lundi 11 août 2003

Lundi 11 - Barcelone

Une carte postale (retrouvée) de Barcelone.



Dimanche, je me suis rendu au téléphérique du vieux port. J'espérais bien que de là-haut il ferait un peu plus frais. Effectivement, il y a bien une petite brise rafraîchissante mais malheureusement, la ballade ne dure vraiment pas assez longtemps! Par contre, la vue sur Barcelone y est magnifique. On distingue facilement la cathédrale, la Sagrada Familia et Las Ramblas. Évidemment, j'ai pris une tonne de photos! J'ai comme l'impression que ces vacances vont encore me coûter cher en développement de photos!

Plus tard, comme j'étais dans Barceloneta, j'en ai profité pour faire une promenade à vélo sur le bord des plages. Dire qu'avant les Jeux Olympiques de 1992, il n'y avait pas de plage, c'était le port de Barcelone! Il existe maintenant plus de 4 kilomètres de plages. Imagine si Jean Drapeau avait fait la même chose à Montréal! Quoique...

Ce matin, comme je ne suis pas encore allé voir la Sagrada Familia cette année, je décide que je vais y une petite halte avant de poursuivre ma route vers le sud de l'Espagne. Je roule dans toutes les rues pendant au moins une heure avant de finalement trouver une place de stationnement. Comme je suis assez loin de la Sagrada Familia, je prends le jeune blanc bec de vélo pour m'y rendre. Comme l'an dernier, il y a encore une longue file d'attente pour la visiter. Je prends quelques photos pour comparer avec celles de l'année dernière mais à mon avis, ils n'ont pas beaucoup progressé! Pas vite vite ces Espagnols!

Je fais le tour une dernière fois et lorsque j'arrive près de la file d'attente, on entend une détonation. Un coup de feu? Il y a un peu de panique dans la file et moi aussi j'ai eu un peu peur car le coup de feu a été tiré vraiment très près de moi, ça me siffle encore dans mes oreilles. Je me retourne et qu'est-ce que je vois? Mon pneu arrière a explosé! La détonation, c'est ce con de vélo qui l'a provoqué. Pas très résistant le jeune blanc-bec. À peine quelques kilomètres et déjà crevé! Et pas qu'un peu, le pneu est foutu, déchiré sur une dizaine de centimètres. 

Est-ce une malédiction où quoi? Aurais-je le droit au moins une fois de pouvoir passer des vacances sans ennuis? L'a-t-il fait exprès pour que je lui témoigne un peu d'attention? C'est vrai qu'il y a un petit froid entre lui et moi, je lui en veux un peu de remplacer Junior, mon compagnon habituel. Toujours est-il que ce n'est pas de la sympathie que j'ai pour lui en ce moment, bien au contraire. S'il n'en tenait qu'à moi, je te le balancerais au bout de mes bras ce petit con!

Zen... il faut que je reste zen, me dirait Michel. J'attache le p'tit crisse de blanc bec à un poteau et je me dirige vers la voiture à pied. Juste pour faire exprès, je suis à l'autre bout de la ville et il fait toujours une chaleur horrible. Dire que ça m'a pris plus d'une heure pour trouver une place, grrr

Je n'ai pas le choix, il faut que je trouve une clinique pour soigner la roue de ce gringalet. Heureusement, je me souviens de l'endroit où j'étais allé l'été dernier avec Junior qui lui aussi avait eu des ennuis de santé! Une fois sur place, je constate que le local est à louer. Je n'ai pas d'autre alternative que d'aller à l'Office de Tourisme pour que l'on m'indique un autre endroit où l'on pourra changer le pneu de ce petit dégonflé.

Évidemment, mon espagnol élémentaire et mon anglais plus que sommaire ne m'aident pas beaucoup à me faire comprendre. La préposée me donne une carte de Barcelone avec des circuits pour les cyclistes! Je lui fais signe de la tête que ce n'est pas ce que je veux et je fais l'effort de lui concocter cette magnifique phrase : "Mi bicilèta ès kapout! Donde ès possible de la réparar!" Mon espagnol doit être pas si tant pire que ça car elle semble m'avoir enfin compris! Elle fait des recherches et trouve une seule adresse à l'autre bout de la ville et me précise que ce n'est pas certain que se soit ouvert un lundi et au mois d'août de surcroit. Me voilà bien avancé!

C'est avec l'idée d'en acheter un autre - ou du moins pour me donner l'envie d'en acheter un - que je me vais au magasin El Corte Inglès, un genre de La Baie Centre-Ville mais en beaucoup plus grand. On peut même y faire son épicerie. Là, qu'est-ce que je vois? Un atelier de réparation! Malheureusement, il ne peuvent pas réparer mon vélo puisque je ne l'ai pas acheté ici, mais il me conseille d'aller un peu plus loin, il y a un grand magasin de sport où il font la réparation. Je m'y rend illico!

Je réussis à expliquer mon cas et le mécano me dit qu'il peut faire la réparation immédiatement, c'est une histoire de dix minutes ! Ouf ! Je lui dis que je vais chercher mon vélo et que je reviens dans 15 minutes. Une fois de retour, un sbire est à la porte et me baragouine en catalan que je ne peux pas entrer avec mon vélo! Je lui montre l'état lamentable du pneu arrière en lui disant "por réparar" mais il continue son baratin. Zen... Voyant que je ne comprends pas un traître mot de son long monologue, il se décide enfin à utiliser ses mains pour me faire comprendre qu'il faut que je passe par l'autre porte sur le côté. Ben, fallait le dire!

Le hic, c'est que je fais le tour de la bâtisse et je reviens à la même porte. Je refais un pas pour entrer avec le vélo, le gorille soulève ses 200 kilos et se dirige vers moi en gueulant! Je lui demande "Donde esta la otra porta?" et je retiens le dernier mot de ma phrase qui aurait été "imbécile" car je ne sais pas trop comment le dire en espagnol. Il fait le dernier pas qui le sépare de la porte et me montre la porte immédiatement à côté de celle-ci, c'est-à-dire, la porte de sortie. Où est la logique?

Enfin, j'entre par la sortie (devrais-je ressortir par l'entrée? L'Obélix qui sommeille en moi se dit: "Ils sont fous ces espagnols!") et j'arrive à une caisse où l'on me fait signe d'aller à l'accueil. Une fois rendu, j'explique que je viens faire changer le pneu de mon vélo. L'employée me dit qu'ils ne prennent plus de vélo car l'atelier est débordé. De moins en moins zen, j'explique que je suis venu il y a 15 minutes, que j'ai parlé au mécano et que c'est lui-même qui m'a dit de revenir. Elle prend son téléphone et appelle le mécano qui lui confirme mes dires. Elle me laisse finalement entrer.

La réparation est en cours, le mécano prépare la facture que je dois aller payer aux caisses à l'avant pendant qu'il réinstallera la roue. Lorsque je reviens, le réparateur me fait signe de le suivre et me montre mon vélo qui est accroché face à son établi. Il me montre que le pneu est trop gros, qu'il frotte sur les freins et le garde-boue. Il doit en installer un autre mais pour ce faire il faut que j'aille me faire rembourser ce pneu à la caisse et que j'en achète un autre.

Finalement, il est passé 18 heures lorsque le vélo est enfin réparé et je ne suis toujours pas parti de Barcelone! 

Aujourd'hui peut-être, ou alors demain. Ce sacré soleil me donne la flemme. Je partirai, après-demain...

Barcelone c'est ici.

 

 

samedi 9 août 2003

Samedi 9 - Barcelone

Une carte postale (retrouvée) de Barcelone.

Barcelone! Ben oui! Je suis arrivé en fin d'après-midi et il faisait 37 degrés! Juste de respirer on transpire. Je pourrais arrêter de respirer mais je crains que ça n'entraîne des conséquences encore plus grandes! Mais je ne vais pas me plaindre de la chaleur, c'est le froid que je n'aime pas! Si seulement je pouvais emmagasiner cette chaleur pour la ressortir lors des gros froids des interminables hivers québécois!

Ah Barcelone! Je me suis tout de suite reconnu en arrivant, comme si j'étais venu la semaine dernière! J'ai même réussi à trouver une place de stationnement pour Cybelle, au même endroit que l'an dernier, au coin des rues Diputació et Roger De Flor. Pour le retenir, j'utilise toujours la même phrase; "Roger déflore dix putes assis haut". 

Je me rends à la Plaça de Catalunya avec le jeune blanc bec qui m'accompagne cet été (je m'ennuie tellement de Junior!), et je continue à pied pour descendre Las Ramblas. C'est fou tout le monde qu'il y a à cet endroit! Je veux absolument me rendre jusqu'à la Font de Canaletes car, parait-il, en buvant de l'eau de cette fontaine du XIXe siècle on est assuré de revenir à Barcelone un jour! C'est que vois-tu, j'avais lu ça l'an dernier dans mon guide Voir et comme je ne crois pas à ces balivernes, j'ai voulu lui prouver à cette fontaine que même si je n'avais pas bu de son eau, je suis de retour! Tiens toi, la légende, met ça dans ta pipe! Et tu sais quoi? Je n'en ai pas encore bu de son eau! 

Ensuite, je me rends sur les marches de la cathédrale pour lire un peu. J'ai bien fait de prendre la cathédrale en photo l'année dernière car cette année, elle est en rénovation! Le soleil est couché depuis un bon moment déjà mais les pierres des marches sont encore brûlantes. 

Lorsque le temps est venu d'aller dormir, je vais à la même aire de repos que l'an dernier. Là, je me stationne au même endroit et j'attache le blanc bec au même poteau où Junior avait ses habitudes. Par contre, je n'ai pas vu Grosse face bleue

Ah oui, c'est vrai, je ne t'ai jamais dit qui était Grosse face bleue puisque j'avais écrit cette anecdote sur une "vieille" carte postale en papier que j'avais envoyé à Martine. Comme je voulais absolument qu'elle lise "sa" carte postale, du coup, je ne t'en avais pas fait part! Alors, pour essayer de me faire pardonner, je t'explique qui c'est. Mieux vaut tard que jamais, non?

Tous les soirs, lorsque j'arrivais sur l'aire de repos pour y passer la nuit et que je me dirigeais vers les toilettes, je croisais Grosse face bleue. La première fois que je l'ai vu, je dois te l'avouer, il m'a fait un peu peur. C'est un grand maigre qui errait toujours entre la station-service et les toilettes. De loin, son visage paraissait bleu, comme un schtroumpf! Le matin quand je quittais l'aire pour aller passer la journée à Barcelone, il était encore là! À croire qu'il passait ces vacances là!

Ce n'est que le troisième soir au moment où je passe près de lui que je constate que c'est le reflet de son T-shirt qui donne cette teinte à son visage. Les cheveux mi-courts et un peu gras, ses lèvres épaisses, son immense nez rouge, sa barbe de trois jours et son T-shirt pas très propre n'aident en rien à rendre à ce personnage un air sympathique.

Puis un matin, alors que je détache le cadenas et que je rends la liberté à mon fidèle compagnon Junior, il s'approche et m'adresse la parole. Comme je lui réponds ma célèbre phrase clé "No habla español", il continue quand même à me parler et, à ce que j'ai cru comprendre, il se demandait depuis quelques temps d'où pouvait venir ce vélo! Il le voyait tous les soirs attaché à ce poteau et le matin il disparaissait comme par enchantement. Il avait même demandé aux autres employés de l'aire de repos s'il était à eux. Il est vrai qu'il doit être assez rare qu'une même personne vienne tous les soirs sur la même aire de repos, qui plus est, avec son vélo! Néanmoins, il m'avait semblé vraiment heureux d'avoir enfin pu élucider ce mystère!

Il continuait de discuter tout en souriant, et là, je ne peux pas dire à belles dents car il avait autant de dents... qu'il lui en manquait. Je pense que c'est à partir de ce moment que Grosse face bleue et moi sommes devenus copains! Lui qui me parlait tout le temps et moi qui imaginait en silence ce qu'il devait me dire! Après ce jour, toutes les fois que j'arrivais sur l'aire de repos et que Junior retrouvait avec autant de plaisir son poteau favori, Grosse face bleue s'approchait et commençait à me jaser ça même si je lui répétait toujours mon traditionnel; "No habla español!". J'ai même pris l'habitude de lui dire un "Holà amigo!" quand je le croisais et il était heureux.

Un soir, où je me brossais les dents, il est entré dans les toilettes, s'est installé au lavabo voisin du mien, a sorti un rasoir jetable de sa poche, a commencé à se raser sans utiliser, ni de crème à barbe, ni d'eau et a continué à me parler! Le bruit que faisait la lame me donnait des frissons, un peu comme lorsqu'on gratte un tableau avec les ongles. 

Le jour de mon départ, j'ai sorti mon espagnol du dimanche (même si nous n'étions pas un dimanche!) et je lui ai dit : "Mi vacancès estan finito. Hasta la vista amigo!" Il a levé sa main droite en l'air et m'a répondu d'un air presque triste : "Hasta la vista!".

Voilà l'histoire de Grosse face bleue!

Barcelone c'est ici

lundi 4 août 2003

Lundi 4 - Oradour-sur-Glane

 Une carte postale (retrouvée) d'Oradour-sur-Glane.



Aujourd'hui je me suis réveillé vers 7 heures et pendant une heure, j'ai tenté de me rendormir mais en vain. À 8 heures je me lève, je prends ma douche et je vais au village pour acheter des croissants avec l'idée d'aller les manger avec mamie, René et Éliane avant de me rendre à Oradour-sur-Glane.

Il est presque 9 heures lorsque je constate que M. Vielmon, le voisin, est de retour. Je ne l'avais pas encore vu depuis mon arrivée. Je décide donc de m'arrêter 2 minutes pour lui dire bonjour afin qu'il ne dise pas encore une fois que je suis sauvage parce que je ne suis pas allé le voir ! Sa femme, que je ne connais pas (j'ai toujours pensé qu'il était célibataire!), me dit que je tombe pile car son mari a besoin d'un coup de main pour monter le bahut de la cave, au rez-de-chaussée et descendre celui du rez-de-chaussée à la cave. Comme ils ne s'attendaient pas à les déménager immédiatement, les 2 bahuts sont encore pleins. Il faut donc les vider pour ensuite les transporter dans un escalier assez étroit et difficile d'accès. Même vide, ils ne sont pas légers! Une fois l'opération terminée, je suis bon pour aller reprendre douche et changer de vêtements.

Finalement, c'est vers 11h 30 que je pars chez ma grand-mère. Un peu trop tard pour les croissants et en plus comme j'espérais être à Oradour-sur-Glane en début d'après-midi, on peut dire que c'est raté! J'avais estimé que ça me prendrait environ 2 heures pour m'y rendre, mais j'avais négligé un élément majeur, les camions!

Il est 16 heures lorsque j'arrive à Oradour. Mais qu'est-ce qu'il y a à voir là-bas me demanderas-tu ? D'accord, je prends 2 minutes pour te l'expliquer.

En 1944, Oradour-sur-Glane est un charmant petit village sans histoires comme tant d'autres. Puis vers 14 heures le 10 juin 1944, une voiture arrive et attire immédiatement l'attention. Il faut dire qu'à cette époque, les voitures sont plutôt rares. "Tiens, un Allemand !" Ce n'était que le premier. D'autres suivirent. Une voiture blindée, une deuxième... puis troisième... cinq... six; un camion... trois camions... dix camions... qui stationnèrent en différents points du village.

La population regarda, remarqua la tenue de guerre des soldats. Qu'allait-il arriver ?  Personne n'était inquiet, il ne s'était jamais rien passé à Oradour; point de maquis, aucune histoire entre les habitants et l'occupant, qu'on ne voyait pratiquement jamais. Très peu de personnes songèrent à s'enfuir quand tout-à-coup, le tambour de ville résonne : Rassemblement général au Champ de Foire. Hommes, femmes, enfants, vieillards, aucune exception. Ainsi, tous les villageois sont rassemblés au centre du village. Un bruit court : c'est pour vérifier les cartes d'identité.

À un moment, un tri de la foule; d'un côté les femmes et les enfants se voient dirigé vers l'église, de l'autre les hommes sont séparés en plusieurs groupes et envoyés vers des granges et des garages. Le temps file et rien ne se passe.

Vers 16 heures une explosion dans le bourg. Aussitôt, dans les divers lieux commence un massacre. Les S.S. tirent à hauteur des jambes sur les hommes qui tombent et s'entassent les uns sur les autres. Les bourreaux tirent toujours jusqu'à ce que plus rien ne bouge. Ils montent sur les corps et abattent ceux qui remuent encore. Puis, en discutant, ils recouvrent les cadavres de paille, de foin, de bois. Les quelques survivants se plaignent, râlent, gémissent. Les S.S. reviennent et allume le feu. C'est l'horreur. Les mourants, les blessés vont brûler vifs...

De l'église où les femmes sont toujours enfermées, elles entendent le claquement des mitrailleuses. "Ils tuent nos hommes!" Après de longues heures d'angoisse, voilà que la porte de l'église s'ouvre. Deux allemands entrent et dépose une caisse volumineuse d'où dépassent des cordons. Ils mettent le feu aux cordons puis sortent en refermant la porte derrière eux. Aussitôt une forte explosion se produit; une fumée âcre, suffocante se dégage. Elles essaient de sortir par la porte de la sacristie qui a cédé. Mais les tortionnaires y avaient pensé. Ils se sont embusqués à l'extérieur et, par les fenêtres, tirent de toutes leurs armes. Un vrai carnage. Encore une fois, les S.S. recouvrent les corps de tout ce qui pourra brûler et mettent le feu.

Il n'y a eu que très peu de survivants. Depuis ce jour-là, Oradour-sur-Glane n'est plus qu'un souvenir. Aujourd'hui, il ne reste que les ruines de ce village que l'État a classé Monument historique.

Voilà! Pas très gai comme histoire! C'est ça que je suis allé voir à Oradour-sur-Glane: L'ENFER! 

Pour en connaître un peu plus, voici un site qui raconte le drame qui s'est produit ce jour-là: http://perso.club-internet.fr/tex69/Oradour/oradour.htm

Oradour-sur-Glane c'est ici.



dimanche 3 août 2003

Dimanche 3 - Monpazier

Une carte postale (retrouvée) de Monpazier.

La première chose que je fais en arrivant, après avoir déposé ma valise, c'est d'aller voir Cybelle! Elle m'a tellement manqué! Et j'ai dû lui manquer aussi car elle se met à ronronner immédiatement! C'est certain  qu'elle me reconnait! Elle sait très bien qu'ensemble nous irons nous promener et que nous en verrons des paysages! Après l'Italie, la Suisse, la Belgique, l'Angleterre, les Pays-Bas, l'Espagne et les nombreuses régions de la France que nous avons visité, jusqu'où irons-nous cette année, ma belle?

Comme de l'Espagne je n'ai vu que Barcelone, pourquoi pas aller visiter le reste du pays? Je pourrais longer la Costa Brava jusqu'en Andalousie, me rendre jusqu'au détroit de Gibraltar et qui sait, peut-être même le traverser? Et pour finir, je pourrais remonter par le Portugal. Dis-moi, ma chère Cybelle, qu'en penses-tu? Mon itinéraire te plaît-il? Évidemment, comme d'habitude, je pourrai le modifier en cours de route. Tu me connais! Mais avant tout ça, pourquoi n'irions-nous pas dire bonjour à Lacapelle?   

Aussitôt dit, aussitôt fait, nous voici en route. Ah oui, elle est vraiment contente de me revoir! Elle ronronne de plaisir tout le long du trajet. Un vrai plaisir à conduire! 

Après un bref bonjour à mamie, René et Éliane, je reprends le chemin de la maison car le sommeil me rattrape. Le temps de passer à la boulangerie pour acheter une baguette et deux croissants au beurre pour demain matin et me voici en route. 

Lorsque j'arrive à la maison, les deux croissants sont déjà avalés et la baguette est sérieusement entamée. Je vais à la cave afin de rétablir le courant, ce que j'aurais dû faire avant d'aller à Lacapelle pour que le chauffe-eau commence à faire ce qu'il fait de mieux; chauffer l'eau! Une fois fait, je me redirige vers le garage et là, qui vois-je? Junior, mon fidèle compagnon de voyage, tout rouge de me voir de retour. Lui aussi semble s'être ennuyé! Je le regarde, là, tout poussiéreux, debout devant moi. J'examine ses nombreuses cicatrices faites lors de nos précédentes aventures. Cicatrices que nous avons en commun car, solidaire, chaque fois qu'il trébuchait, je me cassais la gueule également!

Sa selle fendue, souvenir de Rome, sa pédale gauche toute neuve, souvenir de Barcelone, sa roue arrière voilée lorsqu'elle s'est coincée dans le rail d'un tramway à Amsterdam. Une de mes plus mémorable cascade... involontaire! J'étais passé par-dessus le guidon pour faire une culbute tête la première sur le bitume alors qu'un tramway arrivait. J'avais tout juste eu le temps de me relever et de le dégager de sa fâcheuse position. 

Ah! Que de souvenirs! Qu'est-ce que nous en avons fait des kilomètres ensemble depuis plus de 25 ans! Il m'a vu grandir et moi, je l'ai vu vieillir. Toujours fidèle même si je lui ai brisé le cœur à maintes reprises alors qu'il flirtait avec, tantôt un poteau, tantôt une clôture. N'était-il pas triste, l'année dernière, lorsque je l'ai séparé d'une poubelle amsterdamoise qu'il courtisait près de l'auberge de jeunesse? Elle-même semblait avoir un sérieux béguin pour lui. La preuve c'est qu'au nombre de vélo qu'il y a à Amsterdam, elle était toujours libre lorsque nous arrivions. Je la soupçonne d'avoir évincé plus d'un vélo qui l'ont approché pour garder une petite place pour son beau Junior! N'a-t-elle pas versé quelques larmes lors de notre départ, ne pouvant contenir son trop plein de détritus et d'émotions.

C'est au moment où j'entre dans la maison que je le vois. Lui. L'autre. Celui qui, avec sa jeunesse insolente, brille de tous ses rayons, avec son porte bagage inexpérimenté et son jeune cadre encore vert, veut remplacer mon fidèle compagnon. Comment réagira mon complice de toujours lorsqu'il réalisera que c'est ce jeune blanc-bec qui montera dans la voiture et que lui sera condamné à rester accroché à son vieux clou rouillé dans cette cave noire, lugubre et humide? Comment pourrais-je lui expliquer qu'après tant d'années à voyager ensemble, je le délaisse pour un autre plus jeune, plus beau? (Pas si beau!) Me croira-t-il si je lui dis que je n'y suis pour rien. Si j'avais réellement eu envie de me débarrasser de lui, j'aurais pu le faire l'an dernier. Au lieu de ça, j'ai préféré lui payer une cure de Jouvence. Pensera-t-il que je l'abandonne à cause des nombreuses chutes que nous avons vécu tout le long de nos escapades? 

Il faudra que j'essaie de faire entrer discrètement son rival dans la voiture. Jamais je n'aurai le courage de lui avouer qu'il ne m'accompagnera pas cette année. Ça l'achèverait!

Après toutes ces émotions, je vais me coucher.

Monpazier c'est ici.

samedi 2 août 2003

Samedi 2 - Monpazier

 Une carte postale (retrouvée) de Monpazier.

 Enfin, ça y est, j'ai les deux pieds dans l'avion et déjà, je commence enfin à me sentir en vacance! C'est incroyable, je pense que c'est la première fois qu'un vol d'Air Transat part à l'heure prévue. Mieux encore, il atterrit avec de l'avance! Que demander de plus?   

Le vol se passe bien mais comme d'habitude, je ne réussis pas à fermer l’œil de la nuit.  Après l'atterrissage, que les passagers attendent l'ouverture des portes, un couple de français qui était assis derrière moi, me demande si c'est la première fois que je viens en France. Comme je leur ai dit que non, au contraire, j'y suis venu si souvent que je ne me souviens pas du nombre de fois! L'homme me demande quel endroit je compte visiter lors de mon séjour. Je lui réponds que pour commencer, je vais en Dordogne, à Monpazier plus précisément. Il me regarde et me demande: "Vous ne seriez pas le fils Lacombe?". Alors là, j'ai failli tomber sur le cul!

L'homme, qui s'appelle René, m'explique qu'ils habitent à Villefranche, à une vingtaine de kilomètres de Monpazier, qu'il ne connait pas personnellement mes parents mais qu'il a entendu parler des Lacombe qui viennent du Québec.

Remarque, ce n'est pas la première fois qu'une telle situation se présente. Il y a quelques années à Paris, alors qu'avec Daniel nous regardions les toiles d'un peintre sur la Place du Tertre à Montmartre, je montre une toile représentant une maison à Daniel et je lui dis que la porte de cette maison me fait penser à celle d'une maison de Monpazier. Le peintre qui n'était pas très loin m'a entendu et il me dit, visiblement très étonné, qu'il s'agit effectivement d'une maison de Monpazier! Je lui précise que c'est celle dans la pente sur la Rue de l'Ormeau du Pont, ce qu'il confirme!

"Visiblement vous connaissez Monpazier!! me dit-il! Je lui explique que mes parents habitent là et lorsqu'il me demande leur nom, ça ne lui dit rien. "Et ils habitent dans village?" Là je lui explique que leur maison n'est pas dans Monpazier mais juste en face. "Alors, ils doivent être de la commune de Capdrot, tout comme moi! Et il fait quoi dans la vie votre père?". Je lui dis que ça fait 20 ans que mon père fait des murs autour de sa maison ce à quoi il s'exclame : "Ah ! Çui-là qui fait des murs, qu'ils se cassent la gueule et qu'il les remonte!" Pas d'erreur, on parle de la même personne!

Mais revenons dans l'avion! René, qui a sa voiture chez une connaissance près de Toulouse, m'offre de me ramener jusqu'à Monpazier. Je suis un peu gêné et je lui explique que malheureusement, j'ai déjà mon billet de train. Un peu après le débarquement, alors que nous sommes dans la file d'attente pour passer à la douane, je les croise à nouveau. En repensant bien à son offre, je sauverais environ 4 heures si je monte avec eux plutôt que de prendre le train car j'ai 3 heures d'attente pour ma correspondance. 

Je leur dis que si l'offre tient toujours, je monterais bien avec eux. Une fois dans leur voiture, et comme je n'avais pas dormi dans l'avion, ça n'a pas été long que je suis allé visiter le pays des rêves. Ils m'ont réveillé alors que nous étions devant le portail de la maison! Quel mauvais compagnon de voyage je suis!  Pas fort mon affaire!

Monpazier c'est ici.