Une carte postale (retrouvée) de Barcelone.
Barcelone! Ben oui! Je suis arrivé en fin d'après-midi et il faisait 37 degrés! Juste de respirer on transpire. Je pourrais arrêter de respirer mais je crains que ça n'entraîne des conséquences encore plus grandes! Mais je ne vais pas me plaindre de la chaleur, c'est le froid que je n'aime pas! Si seulement je pouvais emmagasiner cette chaleur pour la ressortir lors des gros froids des interminables hivers québécois!
Ah Barcelone! Je me suis tout de suite reconnu en arrivant, comme si j'étais venu la semaine dernière! J'ai même réussi à trouver une place de stationnement pour Cybelle, au même endroit que l'an dernier, au coin des rues Diputació et Roger De Flor. Pour le retenir, j'utilise toujours la même phrase; "Roger déflore dix putes assis haut".
Je me rends à la Plaça de Catalunya avec le jeune blanc bec qui m'accompagne cet été (je m'ennuie tellement de Junior!), et je continue à pied pour descendre Las Ramblas. C'est fou tout le monde qu'il y a à cet endroit! Je veux absolument me rendre jusqu'à la Font de Canaletes car, parait-il, en buvant de l'eau de cette fontaine du XIXe siècle on est assuré de revenir à Barcelone un jour! C'est que vois-tu, j'avais lu ça l'an dernier dans mon guide Voir et comme je ne crois pas à ces balivernes, j'ai voulu lui prouver à cette fontaine que même si je n'avais pas bu de son eau, je suis de retour! Tiens toi, la légende, met ça dans ta pipe! Et tu sais quoi? Je n'en ai pas encore bu de son eau!
Ensuite, je me rends sur les marches de la cathédrale pour lire un peu. J'ai bien fait de prendre la cathédrale en photo l'année dernière car cette année, elle est en rénovation! Le soleil est couché depuis un bon moment déjà mais les pierres des marches sont encore brûlantes.
Lorsque le temps est venu d'aller dormir, je vais à la même aire de repos que l'an dernier. Là, je me stationne au même endroit et j'attache le blanc bec au même poteau où Junior avait ses habitudes. Par contre, je n'ai pas vu Grosse face bleue!
Ah oui, c'est vrai, je ne t'ai jamais dit qui était Grosse face bleue puisque j'avais écrit cette anecdote sur une "vieille" carte postale en papier que j'avais envoyé à Martine. Comme je voulais absolument qu'elle lise "sa" carte postale, du coup, je ne t'en avais pas fait part! Alors, pour essayer de me faire pardonner, je t'explique qui c'est. Mieux vaut tard que jamais, non?
Tous les soirs, lorsque j'arrivais sur l'aire de repos pour y passer la nuit et que je me dirigeais vers les toilettes, je croisais Grosse face bleue. La première fois que je l'ai vu, je dois te l'avouer, il m'a fait un peu peur. C'est un grand maigre qui errait toujours entre la station-service et les toilettes. De loin, son visage paraissait bleu, comme un schtroumpf! Le matin quand je quittais l'aire pour aller passer la journée à Barcelone, il était encore là! À croire qu'il passait ces vacances là!
Ce n'est que le troisième soir au moment où je passe près de lui que je constate que c'est le reflet de son T-shirt qui donne cette teinte à son visage. Les cheveux mi-courts et un peu gras, ses lèvres épaisses, son immense nez rouge, sa barbe de trois jours et son T-shirt pas très propre n'aident en rien à rendre à ce personnage un air sympathique.
Puis un matin, alors que je détache le cadenas et que je rends la liberté à mon fidèle compagnon Junior, il s'approche et m'adresse la parole. Comme je lui réponds ma célèbre phrase clé "No habla español", il continue quand même à me parler et, à ce que j'ai cru comprendre, il se demandait depuis quelques temps d'où pouvait venir ce vélo! Il le voyait tous les soirs attaché à ce poteau et le matin il disparaissait comme par enchantement. Il avait même demandé aux autres employés de l'aire de repos s'il était à eux. Il est vrai qu'il doit être assez rare qu'une même personne vienne tous les soirs sur la même aire de repos, qui plus est, avec son vélo! Néanmoins, il m'avait semblé vraiment heureux d'avoir enfin pu élucider ce mystère!
Il continuait de discuter tout en souriant, et là, je ne peux pas dire à belles dents car il avait autant de dents... qu'il lui en manquait. Je pense que c'est à partir de ce moment que Grosse face bleue et moi sommes devenus copains! Lui qui me parlait tout le temps et moi qui imaginait en silence ce qu'il devait me dire! Après ce jour, toutes les fois que j'arrivais sur l'aire de repos et que Junior retrouvait avec autant de plaisir son poteau favori, Grosse face bleue s'approchait et commençait à me jaser ça même si je lui répétait toujours mon traditionnel; "No habla español!". J'ai même pris l'habitude de lui dire un "Holà amigo!" quand je le croisais et il était heureux.
Un soir, où je me brossais les dents, il est entré dans les toilettes, s'est installé au lavabo voisin du mien, a sorti un rasoir jetable de sa poche, a commencé à se raser sans utiliser, ni de crème à barbe, ni d'eau et a continué à me parler! Le bruit que faisait la lame me donnait des frissons, un peu comme lorsqu'on gratte un tableau avec les ongles.
Le jour de mon départ, j'ai sorti mon espagnol du dimanche (même si nous n'étions pas un dimanche!) et je lui ai dit : "Mi vacancès estan finito. Hasta la vista amigo!" Il a levé sa main droite en l'air et m'a répondu d'un air presque triste : "Hasta la vista!".
Voilà l'histoire de Grosse face bleue!
Barcelone c'est ici.
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